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La solution pour assurer un meilleur équilibre de la filière agricole ne consiste pas seulement à créer des instruments de couverture, mais aussi à limiter les causes structurelles qui en conditionnent le besoin. Nicolas Sarkozy a prévenu.
Concomitante avec la réforme de la PAC, sa prochaine présidence du G20 militera activement pour une régulation des marchés agricoles. Le rapport sur la prévention et la gestion de l’instabilité des marchés agricoles remis il y a quelques jours à Bruno Lemaire, ministre de l’agriculture, lui offre un grand nombre d’arguments qui se rejoignent tous sur un point : les récentes mutations règlementaires, économiques et géopolitiques ont modifié en profondeur la structure de ces marchés, déconnectant les prix de leurs fondamentaux économiques.
De fait, les exemples d’aberration abondent, comme le quasi-doublement du prix du blé l’été dernier en l’espace d’un mois. Si la sécheresse en Russie a joué un rôle majeur dans ce spectaculaire renchérissement, elle n’en a été que le déclencheur. En aucun cas, elle ne peut en expliquer l’ampleur. Devenue structurelle, la forte volatilité de ces marchés témoigne en réalité de l’importance croissante de nouveaux facteurs. Tentons un éventaire imparfait.
Conséquence d’une décennie boursière perdue au cours de laquelle les marchés d’action se sont globalement dépréciés, les investisseurs institutionnels recherchent à la fois des sources de diversification et des leviers de performance à long terme. Après les hydrocarbures et les métaux, ils se positionnent donc dorénavant, au gré de leurs anticipations et de leurs stratégies d’allocation, sur les marchés de matières premières agricoles, qu’ils considèrent comme des classes d’actifs à part entière. En découle une corrélation entre toutes les classes d’actifs à la disposition des investisseurs : indices boursiers, devises, [a[pétrole]a], mais aussi blé ou colza. De fait, le coefficient de corrélation entre l’indice GSCI, qui reflète l’évolution générale des marchés de matières premières, et l’euro/dollar atteint 57% ! Or, purement financières et patrimoniales, les contraintes de ces fonds ne reflètent pas les cycles économiques des marchés sous-jacents, dont elles amplifient en conséquence le « bruit ».
La volatilité des prix incite les acteurs du marché à se protéger via des produits de couverture simples (produits dits dérivés, négociés sur des marchés organisés) ou plus complexes, pour répondre à la complexité de leur structure de bilan (produits dits structurés, négociés de gré à gré). Or ces derniers sont construits sur-mesure par des [a[banques]a] d’[a[investissement]a] à base de produits optionnels. Pour une même couverture, ce sont donc plusieurs options qui sont utilisées, démultipliant d’autant les mouvements sur les marchés.
Certains acteurs financiers cherchent à tirer profit de tendances de marché à court terme. Alternativement acheteurs et vendeurs de produits optionnels, ils se positionnent sur l’évolution de la volatilité de ces marchés, dont ils accentuent les mouvements. Et cette distorsion est d’autant plus forte que la liquidité de ces marchés est plus étroite que celle des marchés traditionnels (devises, taux, actions, voire [a[pétrole]a]).
Les produits structurés sont souscrits par les entreprises agricoles auprès de [a[banques]a] d’[a[investissement]a]. Or pour neutraliser leur exposition, ces dernières sont obligées d’acheter et de vendre en continu sur le marché les matières premières sous-jacentes de ces produits, accentuant leur instabilité.
Les actes d’achat ou de vente sur les marchés à terme agricoles reposent sur des analyses du marché purement techniques. Ils découlent d’ordres de type stop, ou encore à déclenchement, dont la nature même est déconnectée des fondamentaux des marchés.
Le centre de gravité du monde économique se déplace vers l’Asie, une zone dont les statistiques sur l’offre ne sont pas fiables. Parallèlement, la mondialisation s’accompagne d’une accélération de la circulation de l’information. Résultat, chaque marché, fût-il régional, intègre dans ses cours des informations nombreuses, disparates et parfois hypothétiques. Les acteurs du marché sont donc amenés à réagir aux mêmes présomptions et aux mêmes rumeurs, au même moment et dans le même sens.
La multiplication des incidents climatiques, dix fois plus nombreux qu’il y a un siècle, accroît l’instabilité de l’offre et bouscule les équilibres de bilan des acteurs du monde agricole, les forçant à se couvrir de façon beaucoup plus systématique.
Pour toutes ces raisons, la création de marchés à terme et de nouveaux outils de couverture sont une nécessité pour la filière, sommée de s’adapter à ce nouveau paradigme. Reste qu’en libéralisant les marchés, le législateur a créé une volatilité nouvelle, multipliant mécaniquement le besoin pour des couvertures qui démultiplient indirectement cette même volatilité. La solution pour assurer un meilleur équilibre du système ne consiste donc pas seulement à créer de nouveaux instruments, mais aussi à limiter les causes structurelles qui en conditionnent les besoins.
Source Agritel avec Agence Fargo
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